Pour Pierre Lepori, écrivain, traducteur, auteur de spectacles et critique, la poésie de Sandro Penna a été une source d’oxygène dès l’adolescence: son homoérotisme assumé était « bon à lire », selon ses propres mots, pour l’adolescent qu’il était dans le Tessin conservateur des années 1980, guère ouvert à l’homosexualité. Presque quarante ans plus tard, Pierre Lepori a écrit un monologue théâtral où Penna se raconte (« Le Voyageur insomniaque », présenté au Théâtre 2.21 de Lausanne en janvier 2022). Au même moment, il publie aux Editions d’en bas, « Poesie – Poèmes (1973) »: un choix de 158 brefs poèmes, sélectionnés et ordonnés par Penna lui-même en 1973 sur l’invitation des prestigieuses éditions Garzanti. Pierre Lepori et les Editions d’en bas les proposent en édition bilingue. Ce n’est pas, loin s’en faut, la première traduction française de Penna, et les précédentes sont signées d’auteurs et de traducteurs de talent et de renom, très bien placés dans le monde des lettres (Jean-Noël Schifano, Dominique Fernandez, Bernard Simeone, René de Ceccatty…). Qui pourtant n’ont pas réussi à imposer la voix de Penna dans le monde francophone. « Peut-être pour un problème de traduction, justement? », se demande Pierre Lepori. Il tente l’aventure à son tour, polissant ses versions entre rythme, rime, limpidité, et en soulignant la dimension moqueuse ou drôle de cette poésie, prenant à l’occasion ses propres licences poétiques. Jusqu’au dernier poème du recueil: « Et puis comme une mouche / engluée dans du miel ». Autoportrait de l’artiste. Francesco Biamonte, QWERTZ RTS, 1 mars 2022.Écouter en ligne (TSR)
Victor De Sepausy, Actualitté, 9.2.2022Diana Pakrevan, Caos Cultura, 1 febbraio 2022 Obiettivo esplicito – e pienamente centrato – dello spettacolo è far scoprire un grandissimo poeta italiano, senza imprigionarlo nella ristretta cerchia degli autori omosessuali, far cogliere il complesso e l’ambiguo che si celano nei suoi versi in apparenza semplici, conservare il delicato equilibrio fra ombra e ironia leggera, collocarlo all’interno della costellazione dei suoi contemporanei. La scenografia spoglia fa risaltare una parola essenziale, che non ha bisogno di orpelli.
Le poèteSandro Penna (1906-1977), qui a marqué la littérature italienne du XXe siècle, est resté relativement peu connu dans le monde francophone. L’écrivain et traducteur Lou Lepori (anciennement Pierre Lepori) nous introduit à cette poésie pennienne méconnue dans une traduction du recueil Poesie/Poèmes (1973) du poète italien qui est parue ce mois-ci aux Éditions d’en bas, en parallèle de la création d’un spectacle Le Voyageur insomniaque au Théâtre 2.21. Ce dernier a également traduit en italien Gustave Roud.
J’aimerais me présenter, m’expliquer, mais comment faire? Difficile de cadrer, de dessiner une image nette, pour quelqu’unə qui se revendique queer et non-binaire – c’est une longue histoire. Une vie chaloupante et grisante, jamais en ligne droite, parfois hors-sol. D’étape en étape, de lutte en lutte. Grandiə dans une province paumée (sorry Tessin…), j’ai fui à Milan, Florence, Naples, et terminé ma course d’études à Sienne, avec un mémoire de licence sur Luchino Visconti et le mélodrame. Je devins ensuite journaliste radio, une passion toujours galopante, avec trente ans bientôt au compteur. Et puis non, ça ne me suffit pas, je reprends par deux fois le chemin des écoles: une thèse à Berne, qui me donne le titre ronflant de docteurə; une formation en mise en scène à la Manufacture, d’où je sors sans diplôme. Depuis longtemps, j’ai posé mes bagages à Lausanne, j’aime cette ville à la bonhomie bobo, bien que je parte toujours autant. Pour trouver le calme et l’émotion, entre une ancienne petite gare dans la prairie aux Sciernes (FR) et Paris, entre Berlin et Barcelone, entre Rome et Montréal, où je passe désormais mes étés. Mais je ne suis pas voyageurə, il m’en manque le courage (sauf moralement peut-être) et la paresse est ma compagne (sauf dans l’écriture). J’écris, je vis, j’écris, je vis. Je me donne aussi le droit de créer au théâtre; parfois j’ose enseigner à la Haute école des Arts de Berne ou à l’Université de Genève: le queer, l’anarchie et le féminisme. Avec le temps, et après avoir fondé et dirigé une revue littéraire (“Hétérographe”), une petite trentaine de livres ont vu le jour, en italien et français sous ma plume; en anglais et allemand, grâce à des anges traducteurices. J’ai aussi joué ce rôle: j’ai adoré traduire Laederach et Roud, Penna et Rahmy (ou encore Lonati, Vischer, Daviddi...). Italien-français aller-retour, toujours un peu de traviole, queer in translation, portéə par la joie et le mélo, parfois par la rage. Ce site vous accueille dans mon chantier, soyez les bienvenues. (Lou Lepori)
Image d'en-tête: Nicoz Balboa
Photo: Matthieu Gafsou
Lo scopo di questo breve testo è presentarmi, ma come si fa? Queer e non-binary, ho dovuto lottare, impennarmi e dar battaglia, pur cercando di non perdere dolcezza e vulnerabilità. Cresciuto in Ticino – terra dura in cui il motto più ricorrente era “vola basso” – non ci ho messo molto a voler scappare: in Italia, prima, dove dopo Firenze (Milano e Napoli) ho finito per approdare a Siena, laureandomi con una tesi su Luchino Visconti e il Melodramma. Dopo un breve ritorno a Lugano, via di nuovo, questa volta (quasi) per sempre: a Losanna, nella Svizzera di lingua francese. Dico per sempre ma è un modo di dire, pur amando questo borgo selvaggio e colto, ho rimesso tante volte le gambe in spalla. Non per amore del viaggio, né per coraggio (temo di averlo solo moralmente), ma per bisogno di solitudine, di emozione, di scrittura: Berlino, Parigi, Londra, Barcellona, Roma, Perugia (e a volte un minuscolo villaggio della Gruyère) e poi soprattutto Montréal, dove passo le estati. In mezzo ci sono tante altre cose: trent’anni di lavoro appassionante per una radio culturale (Rete Due), un dottorato in Theaterwissenschaf all’Università di Berna, una formazione senza diploma in regia teatrale alla Manufacture, l’alta scuola universitaria delle arti sceniche. Oggi, a volte, tento d’insegnare: alla Scuola d’Arte di Berna (HKB) o all’Università di Ginevra: il queer, l’anarchia, il femminismo sono i miei temi di predilezione; e oso continuare a fare teatro – una passione da sempre illimitata. E poi: ho fondato e diretto una rivista letteraria (“Hétérographe”), ho pubblicato una trentina di libri, in italiano e in francese (a volte tradotti anche in tedesco e inglese); ho tradotto anch’io dal francese all’italiano e viceversa (Roud, Laederach, Ponti, Penna, Vischer, Lonati, Daviddi). Niente di rettilineo, tuttavia, tutto un po’ di sguincio e con furore o rabbia. Questo e altro troverete tra le pagine di questo sito, su cui vi auguro un caloroso benvenuto. (Lou Lepori)